L’esprit justicier

16 décembre 2013
 Shinny sur l'étang au coucher du soleil

Une fois encore, dans la soirée du 7 décembre, nous avons pu voir l’esprit justicier à l’œuvre au sein de la LNH quand le fier-à-bras des Bruins de Boston, Shawn Thornton, a réagi à une mise en échec discutable de l’un de ses coéquipiers. Au cours de la première période du match opposant les Bruins de Boston et les Penguins de Pittsburgh, Shawn Thornton s’en est pris sournoisement par derrière à Brooks Orpick le jettant au sol. Alors qu’Orpick était vulnérable et sans défense, Thornton lui a asséné des coups de poing à la tête. Orpick a quitté la patinoire sur une civière pour être transporté à  l’hôpital le plus près.

Or, il se trouve que c’était un match diffusé à l’échelle nationale à la Soirée du hockey, version anglaise sur CBC, et que nous avons eu droit, durant la première intermission, aux commentaires passionnés de Don Cherry. Seul Don Cherry pouvait déduire de cette scène que Shawn Thornton en était la victime!

L’esprit justicier se manifeste dans les groupes ou les communautés au sein desquels les membres n’ont pas l’impression que les lois et ceux responsables de leur application sont compétents. Un petit nombre s’autoproclame redresseurs de torts et administre la justice comme ils le voient bon. Cette approche était prévalente dans les années 1800 à l’époque de la colonisation de l’Ouest où l’état de droit et l’ordre étaient difficiles à instaurer.

Notre société a fait beaucoup de chemin depuis l’époque des cowboys, des hors-la-loi et du Far West. La primauté du droit prévaut au sein des sociétés civilisées. Les règles et les droits qui régissent la société de maintenant sont convenues de manière démocratique et ceux qui s’en écartent sont considérés des criminels et punis suivant la gravité de leurs fautes. Malheureusement, il perdure au sein de la société des individus et des groupes et certaines cultures qui se soustraient sans respect à la primauté du droit. Les individus qui s’adonnent à l’autojustice commettent des infractions criminelles et la primauté du droit s’applique à leur encontre.

Comment se fait-il que la LNH et ses joueurs peuvent se comporter en toute impunité et en faisant fi de la primauté du droit? La société ne devrait-elle pas par l’entremise de son système de justice pénale sévir contre de tels comportements sur la glace si la LNH est incapable d’y imposer l’ordre?

Dans ses réflexions sur ces questions, la LNH devrait réfléchir à la question suivante : « Pourquoi les joueurs de la LNH ressentent-ils le besoin de se faire justiciers? » La réponse tient à deux raisons. La première, les règles de la LNH visant à réprimer la violence gratuite, y compris les bagarres et les coups à la tête, sont à ce point clémentes qu’elles encouragent les comportements qu’elles sont censées juguler. (La suspension de 15 matchs imposée à M. Thornton est comparable à d’autres suspensions imposées antérieurement à d’autres joueurs pour des offenses similaires –  et elles n’ont pas mis fin à ce genre de comportement.) La seconde, les règles telles qu’elles existent, aussi faibles et inefficaces soient-elles, ne sont pas appliquées uniformément. Cette application non uniforme suscite de la confusion et de la frustration. Quand ces deux conditions sont réunies, vous encouragez une culture de redresseurs de torts. Et au sein de la LNH, ce type de comportement est trop souvent glorifié et récompensé.

Cette culture de justiciers au sein de la LNH a des conséquences, soit un nombre croissant de blessés (pensons à Steve Moore, Sidney Crosby et maintenant à Brooks Orpick). Les propriétaires des équipes de la LNH doivent se réveiller et prendre des mesures claires et définitives avant que plus de tort ne soit causé à leurs joueurs et à leur ligue, et aux enfants qui imitent leurs héros de la LNH!