Le dopage est-il une infraction criminelle au Canada?

10 décembre 2014
 Lancer du ballon

Cela peut vous sembler une question bizarre, la réponse étant de toute évidence, non. Mais, regardons la question d’un peu plus près et voyons si le dopage ne devrait pas être une infraction criminelle au Canada.

Cette semaine, le gouvernement allemand déposera un projet de loi destiné à faire du dopage une infraction criminelle dans ce pays, avec des sentences pouvant aller jusqu’à trois années d’emprisonnement. Pour l’individu moyen, cela peut sembler à première vue une mesure extrême. On pourrait penser qu’après tout, il ne s’agit que de sport!

Mais l’Allemagne n’est pas le premier pays à adopter une telle mesure. L’Italie, par exemple, a déjà fait du dopage une infraction criminelle. Nous avons même entendu de la part d’un certain nombre d’athlètes canadiens qu’ils aimeraient voir le Canada adopter une approche similaire. Les athlètes propres veulent une répression plus forte du dopage et le fait de rendre le dopage contraire à la loi répondrait certainement à cet objectif.

En tant qu’actif public, le sport peut produire au Canada des bienfaits énormes pour ceux qui le pratiquent, pour les communautés qui le soutiennent et pour notre pays dans son ensemble. À preuve, les nombreux bienfaits que nous avons connus durant et après les Jeux de Vancouver de 2010. Les Jeux nous ont unis en tant que pays, ils ont rapproché les communautés alors que nous acclamions nos héros locaux et que ceux-ci inspiraient les jeunes à s’impliquer dans le sport et à voir grand. Que serait-il arrivé si un athlète médaillé canadien s’était fait prendre pour dopage, que serait-il resté comme héritage des Jeux? Le dopage sape l’intégrité du sport et, ce faisant, prive le sport de plusieurs de ses effets positifs.

Le dopage implique l’utilisation de substances ou de méthodes interdites en vue d’obtenir un avantage concurrentiel dans le sport. Le recours à de telles substances et méthodes comporte des risques importants pour la santé de l’athlète. Sans des règles antidopage dans le sport, les athlètes propres se sentiraient forcés de mettre leurs corps et leur santé à risque pour rivaliser avec les athlètes dopés. À leur tour, les jeunes athlètes prometteurs estimeraient qu’eux aussi doivent encourir ces risques sérieux pour la santé afin de poursuivre l’excellence sportive. Or la majorité des athlètes et le public canadien veulent que le sport soit propre. Le sport sans dopage, ce n’est pas seulement dans l’intérêt du sport – c’est carrément dans l’intérêt du public tout autant.  

Aussi, nous avons un ensemble cohérent de règles dans le sport qui régissent le comportement relatif au dopage. Celles-ci sont définies dans le Code mondial antidopage et appliquées au Canada en vertu du Programme canadien antidopage. En se dopant, les athlètes contreviennent à ces règles. Se doper, c’est tricher. C’est le fait d’un athlète qui dénature sa performance sportive vis-à-vis les autres athlètes et le grand public en faisant comme si sa performance était conforme aux règles alors qu’elle ne l’est pas.

À compter de janvier 2015, les conséquences d’être reconnu coupable de dopage intentionnel en vertu du Code mondial antidopage augmenteront à une suspension de quatre ans pour une première offense. Il s’agit très certainement d’une pénalité passablement sévère, mais néanmoins le dopage continuera d’exister étant donné que certains athlètes et ceux qui les conseillent seront prêts à jouer le tout pour le tout quant à ces conséquences. Faire du temps en prison et avoir un dossier criminel exerceraient-ils sur les athlètes qui envisagent de se doper un effet plus dissuasif que l’actuel Code mondial antidopage?

Nous savons que certaines substances apparaissant sur la Liste des interdictions pour dopage sont déjà des substances illégales et leur importation et leur vente sont aussi illégales au Canada. Cela ne fait évidemment pas du dopage une infraction criminelle.

Toutefois, si nous convenons que le dopage intentionnel est un effort malhonnête pour obtenir des résultats, de l’argent, une reconnaissance et une renommée qui devraient à juste titre appartenir à une autre personne, alors il s’agit d’une forme de fraude. Si nous regardons le dopage comme le fait pour un athlète de ravir à un autre athlète qui est propre des possibilités, du financement, de l’argent et un statut dans le sport, alors nous pourrions considérer le dopage comme une forme de vol. Or la fraude et le vol sont tous deux des infractions criminelles au Canada. Peut-être est-il temps de traiter le dopage comme une infraction criminelle. Qu’en pensez-vous?